Pour tout vous dire…

Les droits de l'homme s'arrêtent la ou commencent ceux des affaires

Ces conseillers que l’on dit Sages, en Côte d’Ivoire comme en France.

Alors que le “monde entier”, du représentant de l’ONU en Côte d’Ivoire, en passant par ceux de l’Union Européenne et les différents leaders politique français, de droite comme de gauche, conteste l’élection à la présidence de la République de Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo, j’aimerais attirer l’attention sur le paradoxe de ces réactions.

La Côte d’Ivoire, pays souverain, est dotée d’un Conseil Constitutionnel qui a déclaré qu’à l’issue du dépouillement des votes pour les élections présidentielles ivoiriennes, Laurent Gbagbo était légalement et légitimement le Président de la République de Côte d’Ivoire. Mais tout le monde a l’air d’oublier que la Côte d’Ivoire est un pays “démocratique”, labellisé comme tel par les plus grandes puissances internationales, et que sa Constitution nationale et ses institutions sont très très proches de la Constitution et des institutions françaises.

J’entends énormément de mes concitoyens critiquer cette déclaration du Conseil Constitutionnel ivoirien au prétexte que les membres de ce conseil sont tous des personnes nommées par Laurent Gbagbo, ce qui entachent leur décision d’un partisianisme de mauvais aloi qui l’invalide totalement.

En suivant jusqu’au bout cette logique, nous devrions alors tous contester fortement la décision prise par le Conseil Constitutionnel français, en date du 9 novembre 2010 , concernant le recours déposé par l’opposition parlementaire contre la loi portant réforme des retraites , au prétexte que l’ensemble des membres du Conseil Constitutionnel sont, sans exception, tous nommés par des membres de la majorité présidentielle, que ce soit le Président de la République, le Président de l’Assemblée Nationale ou celui du Sénat ou leurs prédécesseurs!

Allons donc ! Les sages du Conseil Constitutionnel ivoirien seraient plus partisans que les sages du Conseil Constitutionnel français ?

Ils oublieraient plus facilement leur mission principale, qui en France, comme en Côte d’Ivoire, consiste à contrôler la constitutionnalité des normes et de contrôle de la régularité des grandes consultations politique ?

Examinons de près par qui les membres du Conseil Constitutionnel français, qui ont siégé lors de cette séance du 9 novembre 2010, ont été nommé :

Vous pouvez constater comme moi, que tous ces conseillers, que l’on dit Sages mais pas surhommes,  doivent leur place au Conseil Constitutionnel à une décision politique et non à une quelconque compétence avérée en droit constitutionnel. Loin de moi l’idée de vouloir entamer un débat de juriste sur la légitimité des juges constitutionnels et sur leurs droit à s’opposer à la volonté des représentants du peuple souverain. Cependant , cette “affiliation” à la majorité présidentielle souligne une proximité « culturelle et politique » qui n’est pas neutre dans leur interprétation de la Constitution Française. Pour des personnes plus ou moins d’accord avec la réforme des retraites, telle que voulue par  Nicolas Sarkozy, le processus de vote de cette réforme est son contenu lui-même, ne pouvaient paraître qu’éminemment constitutionnel.

Et tout le paradoxe des réactions que je citais plus est est là. On accepte pour la France ce qu’on n’accepte pas pour la Côte d’Ivoire!

Si l’on considère que la Constitution est « la Reine des lois » en France, comme en Côte d’Ivoire, elle ne peut être interprétée que par des élus et non par des personnes qui doivent leur fonction de conseiller à des jeux politiques.

Elle ne peut non plus être confiée à des personnes qui sont peut-être très honnête dans leur lecture de la Constitution, mais qui ont une proximité beaucoup trop grande avec le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif et ne représentent pas le troisième pilier de l’équilibre républicain qu’est le pouvoir judiciaire. C’est là une anomalie grossière, injustifiée, qui entachent la décision du Conseil Constitutionnel de partialité et de partisianisme.

Alors, en Côte d’Ivoire comme en France, il est attristant de constater que nous vivons dans des démocraties totalement verrouillées et perverties. Le « fait majoritaire », surtout quand l’abstention électorale dépasse les 43 % des personnes inscrites sur les listes électorales, est une aberration dangereuse.

Plutôt que de se lancer dans la chasse aux dysfonctionnements démocratiques des pays d’Afrique, notre personnel politique serait mieux avisé de s’atteler dès maintenant à une réelle transformation de nos organismes de contrôle de la République et de la Démocratie constitutionnelle, en commençant par le mode de désignation des membres du Conseil Constitutionnel.

Source: Le Point; Le Monde; Conseil Constitutionnel

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Réforme des retraites : recours devant le conseil constitutionnel.

Les députés communistes et apparentés ayant refusé de s’associer à un recours contre la réforme des retraites, ce sont les députés du Parti Socialiste et les députés Verts qui ont déposé, ce mardi 2 novembre, un recours auprès du Conseil Constitutionnel.

Ce recours porte sur :

– une rupture d’égalité des citoyens devant la loi:

Les élus estiment que plusieurs dispositions portent atteint au principe d’égalité et son contraire à la Constitution en se référant à son préambule et à son article premier qui stipule :

“Art. 1. – La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. “

Sur le fond, les parlementaires socialistes affirment que le principe d’égalité a été malmené de très nombreuses fois, dans ce texte de loi et que l’égalité entre les salariés est mise en cause .

– Pour appuyer leurs propos, ils citent l’exemple des salariés « qui ont commencé à travailler tôt et qui devront en réalité cotiser plus longtemps en attendant d’atteindre l’âge légal de départ de 62 ans ».

– Autre point sur lequel l’égalité va être malmenée : l’égalité entre les salariés qui seront traités de manière identique, alors qu’ils se trouvent dans des situations différentes, notamment les salariés confrontés à la pénibilité »

– Dernier point d’inégalités, selon les socialistes, celle qui touche les  femmes, particulièrement atteinte par le report de 65 à 67 ans du départ de la retraite sans décote, les chômeurs qui ont connu des carrières professionnelles hachées et pour les ouvriers qui ont une espérance de vie de 7 ans inférieurs à d’autres catégories sociales.

– La procédure de vote utilisé, notamment à l’assemblée nationale:

Sur ce point, les parlementaires considèrent : « en combinant le huis clos en commission avec la procédure du temps programmé, le législateur a porté une atteinte manifeste au principe de clarté et de sincérité des débats parlementaires. »

En outre ils estiment que le refus de donner la parole à 142 députés, que Bernard Accoyer à opposé lors du débat à l’assemblée nationale, constitue “une atteinte manifeste à l’article 3 de la Constitution ainsi qu’aux exigences de clarté et de sincérité des débats parlementaires.

Rappelons que l’article 3 de la Constitution stipule :
"Art. 3. – La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum.
Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.»

Le conseil constitutionnel a désormais un mois pour statuer sur ce recours.

– Sur le fond, je n’ai aucun doute que la décision du conseil constitutionnel, qui s’est déjà illustré par sa tolérance face aux inégalités, rende un avis favorable au texte de loi.

– Sur la procédure de vote, il me semble que le Conseil Constitutionnel va devoir faire très attention.

1) S’il estime que le processus de vote a été conforme à la Constitution, cela reviendra à dire que le règlement de l’Assemblée Nationale prévaut sur les textes constitutionnels, puisque c’est à ce titre que son président a pris la décision de clore le débat.

Dans ce cas, qu’en sera-t-il d’un État, d’une République, d’une Démocratie dans laquelle un règlement administratif, fussent-ils celui de l’assemblée nationale, est au-dessus du texte de la constitution ?

Une telle décision s’apparentait fort à un véritable déni de la Souveraineté Nationale et des représentants du peuple. Ce serait entériner un changement de régime déguisé. Nous ne serions plus en Démocratie, ni en République.

2) Si, en s’appuyant sur l’article 3 de la Constitution, il déclare que le processus est anticonstitutionnel, cela obligera le gouvernement a représenter son texte de loi devant le Parlement, en application de l’article 10 de la Constitution. Car comment pourrait-il en être autrement? J’imagine mal le Président de la République promulguer une loi qui a été votée en bafouant un article de la constitution française.

Contrairement à ce qu’affirmait certains ténors de la droite présidentielle, au travers de médias complaisants, et Raymond Soubie,  la réforme des retraites et tout sauf entérinées.

Il reste désormais au Conseil Constitutionnel, protecteur de la Constitution Française, a décider si la manœuvre utilisée pour faire voter cette loi est conforme à la loi suprême du pays ou si elle ne l’est pas.

De mon point de vue, il est assez clair que Bernard Accoyer, lorsqu’il a empêché 142 députés de s’exprimer lors du débat sur la réforme des retraites , a gravement porté atteinte à “l’exercice de la souveraineté nationale” par les représentants du peuple que sont ses 142 députés.

Qu’en dira le Conseil Constitutionnel? La question est d’importance pour notre avenir et celui de notre pays!

C’est pourquoi, vous l’aurez compris, il me semble indispensable que nous restions tous très mobilisés le 6 novembre et très attentif à la décision que va prendre le conseil constitutionnel dans le mois qui vient.

Source : Le Point ; Capital ;Légifrance ; Conseil Constitutionnel

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